Ça n’est pas comme si l’Abitibi me coulait dans les veines. Je n’y suis pas née. Je n’y ai pas grandi. Pourtant, elle a pour moi comme pour plusieurs autres outsiders un goût très marqué de revenez-y.
Mon seul claim to Témiscamingue me vient de la famille de mon père qui avait un chalet dans le coin de Belleterre, où un beau soir mon grand-oncle aurait décidé de saouler mon père (alors âgé de 13-14 ans) au gros gin. L’histoire se termine avec la prise d’une mauvaise porte, une tante qui hurle et un pubère de futur père assez confus merci.
Bref, on n’est pas retournés en famille souvent. Mais à défaut d’y être ancrée, je pose souvent le pied à Rouyn par les temps qui courent; le chum, lui, est de souche jusqu’aux ongles. À l’aube de l’épique Festival de musique émergente en Abitibi-Témiscamingue, voici ce que je retiens à date de ma poignée de voyages (six!) en Abitibi.
La route
C’est sûr que sept heures de char, ça fait réfléchir. Notamment au fait que New York, c’est qu’à cinq heures de Montréal. Mais la route vers Rouyn-Noranda est toute lisse, généralement pas achalandée, et y’a pas tout le trouble de la douane.
Sur ce sujet d’ailleurs – et surtout dans un contexte de festival musical -, l’an passé pendant le FME le journal local titrait, sur une éloquente page frontispice de mains roulant un joint: «PÉNURIE DE POT À ROUYN.» Ce qui me semble très étrange puisque j’ai déjà eu un coloc qui plantait là-bas pour arrondir ses fins de mois, mais bon, tirez-en vos propres conclusions. Y’a un conseil de caché là-dedans.
Le Cab
C’est le réputé Cabaret de la dernière chance. D’accord, ça fait un peu «toune de Boom Desjardins pour une pub de la Maison Jean-Lapointe» comme nom, mais c’est plus simplement l’Cab: une saveur bien locale où se rencontrent le rock et la chanson en toile de fond, et où les 5 à 7 aiment aussi se déhancher quand le troisième shooter embarque.
Côté décor, ça ressemble à un Divan orange sis dans le Quartier Latin, et les shows qui y sont traditionnellement présentés à minuit pendant le FME deviennent souvent des performances marquantes pour les artistes invités. Disons qu’au Cab, c’est jamais compliqué et c’est jamais plate.
Le bar des chums
Un bar avouons-le assez miteux, «hochelaguesque» et pittoresque comme un Père-Noël en état d’ébriété. J’ai moi-même pu apprécier son karaoké-pas-karaoké (assuré par Nuance, un duo où un monsieur fait jouer des tracks souvent préprogrammées à une madame, qui elle chante en lisant des paroles sur un écran… mais attention, personne d’autre n’est autorisé à tenir le micro) un certain soir de scotch.
httpv://www.youtube.com/watch?v=wBsOsZUWz_U
Commode, Le bar des chums est placé pas très loin du Cab sur l’avenue Carter, et même s’il est regardé de haut par les mœurs locales, constitue un bon pit-stop pour voir Pierre Lapointe avec un bock de bière sur la tête par exemple, ou encore Yann Perreau qui boogie. Et on peut jouer au pool.
Les trous
Ôtez-vous le Bar des chums de l’esprit ici. En Abitibi, les trous font vivre les gens, et les font déménager. C’est certain que c’est affligeant de regarder les paysages défigurés et les populations décimées par des big bad entreprises minières motivées par le cash, mais c’est aussi la raison d’être de plusieurs gens là-bas.
Simon Plouffe, un ami originaire de Rouyn, bosse actuellement sur un film aptement intitulé L’or des autres qui relate toute la saga Malartic. Parce que Rouyn c’est aussi le festival du cinéma international et celui, plus rigolo, du faux documentaire. Distance oblige, là où y’a des trous, y’a aussi des monticules de créativité.
Le FME
Et pour terminer, voici la raison de mon premier coup de foudre avec Rouyn. Un gros pow-wow musical qui donne et continue de donner, tous les week-ends de la fête du travail depuis huit ans; si l’ambiance de partage et de communion avec la musique est palpable à Pop Montréal, elle vous jute carrément dessus au FME. Une immersion complète.
Suivez-nous aussi sur Nomag. Vidéo du Bar des chums par Cantin XP3
Beau papier, Èvelyne!
See you in the char!